Discours du Gouverneur Jean Baden Dubois dans le cadre du lancement du forum sur la problématique de la disponibilité et de la distribution de la monnaie en Haiti
Madame le Directeur General,
Messieurs les représentants du Ministère de l’Économie et des Finances,
Monsieur le PDG du Groupe Croissance
Mesdames, Messieurs les Directeurs des Banques Commerciales,
Mesdames, Messieurs les représentants des supermarchés et autres établissements commerciaux,
Chers collègues de la BRH et du système bancaire,
Distingués invités,
Le thème du forum d’aujourd’hui est d’une importance qu’on ne saurait trop souligner. Cette importance tient au caractère vital que revêt la monnaie dans toute société qui participe aux mouvements et transactions de l’économie moderne. Il est vrai que, depuis quelques temps déjà, la monnaie traditionnelle est en proie à la concurrence vigoureuse de diverses formes non physiques de moyens d’échange. Il est vrai aussi que l’évolution monétaire la plus marquée dénote une tendance croissante à la dématérialisation, surtout avec l’émergence récente de monnaies électroniques comme le bitcoin. Toutefois, cette réalité n’empêche guère encore que la monnaie physique ou le cash reste cet élément nécessaire pour échanger pleinement dans nos sociétés contemporaines de production. En fait, on n’a pas hésité à attribuer au mouvement de circulation de la monnaie au sein de l’économie des attributs pareils au mouvement du sang à travers le corps humain.
Un rôle si prépondérant, essentiel même pourrait-on dire, s’explique par le fait que la monnaie est un intermédiaire de choix qui permet aux agents économiques de manifester une demande effective pour les divers produits disponibles sur le marché. Elle est donc cet instrument unique d’amélioration des circuits d’échanges, un maillon incontournable de la chaîne économique qui unit la production à la consommation. C’est une fonction que la monnaie a toujours exercée, et ce, comme nous le révèle la numismatique, à travers les diverses formes qu’elle a connues depuis le troc du tout début.
De manière encore plus fondamentale, et d’un point de vue conceptuel, la monnaie permet aux opérateurs du marché d’évaluer quantitativement ladite demande afin, d’une part, d’exprimer la force de celle-ci par rapport à l’offre disponible et, d’autre part, de refléter la rareté relative des biens et services telle qu’exprimée par le système des prix. À cela, il faut ajouter les atouts instrumentaux de la monnaie, lesquels se manifestent à travers les diverses fonctions de celle-ci. Ainsi, la monnaie :
- se fait unité de compte, de par sa divisibilité ;
- elle se fait réserve de valeur, de par sa durabilité ;
- et elle se fait moyen de paiement, de par le consensus collectif qui garantit son invariable acceptabilité.
Dès lors, au vu de tous les enjeux qui découlent du rôle qu’elle assume pour le financement de l’économie, l’on comprend que la monnaie se place au cœur de la mise en œuvre par la Banque Centrale de sa mission de surveillance du fonctionnement du système financier en vue d’en assurer la stabilité constante. C’est que le cash reste, jusqu’à aujourd’hui encore, le moyen prédominant de règlement des transactions financières routinières de l’économie domestique. Du coup, il revient à la Banque Centrale d’assurer que le système économique haïtien, dans toutes ses composantes, sans exclusive, dispose d’une monnaie fiable, et disponible sans restriction et de manière continue.
Ce mandat consistant à s’assurer que les moyens de paiement en monnaie fiduciaire mis à la disposition du public suffisent pour répondre aux besoins de l’économie, c’est à sa Direction de la Caisse et du Réseau que la BRH l’a confiée. Un tel mandat se place en ligne directe de la vision que le Conseil d’Administration que j’ai l’honneur de diriger a définie pour la BRH, et je cite :
« Une banque centrale moderne et efficiente, soucieuse de la stabilité des prix et du développement du système financier et déterminée à encourager la croissance des secteurs réels de l’économie dans l’optique d’une Haïti inclusive ». Fin de citation.
Cependant, la BRH croit qu’un système ne peut fonctionner à point que lorsqu’il y a cohérence entre les comportements de toutes les structures qui le composent. Si telle composante remplit le rôle dévolu à telle autre, des confusions se créeront, des goulots d’étranglement se formeront, et des inefficiences se développeront. Naturellement, ce système finira par s’essouffler.
L’organisation de ce Forum découle à la fois de cette vision d’inclusion des secteurs réels de l’économie et de ce mandat d’assurer l’approvisionnement adéquat du marché en monnaie fiduciaire.
Divers sujets seront débattus au cours de la journée. Citons, entre autres :
- la nécessité de créer un mécanisme de dialogue entre les Directeurs des Opérations des Banques afin de mieux servir les agents économiques ;
- la problématique de la disponibilité de la monnaie chez nous ;
- les annonces et propositions qui seront faites par la Direction de la Caisse et du Réseau pour une gestion plus moderne et plus efficiente des questions relatives à la gestion du cash ;
- et j’en passe.
Toutes ces conversations et tous ces échanges participent de cette politique d’ouverture que la BRH entend pratiquer à l’égard de tous les acteurs de l’économie réelle. La tenue de ce Forum est aussi une des nombreuses manifestations de notre politique de partage et de divulgation de l’information financière.
En vous accueillant ici ce matin à l’occasion du lancement de ce Forum, j’espère témoigner, s’il en était besoin, de l’importance que l’actuel Conseil d’Administration de la BRH accorde à la stabilité du système financier de notre pays. C’est également un gage de soutien envers la Direction de la Caisse et du Réseau qui a résolument embrassé la vision du Conseil et qui, ces derniers temps, se distingue par un certain nombre d’initiatives orientées vers cette modernité et cette efficience que nous prônons. Je pense particulièrement à l’acquisition et à la mise en service d’équipements sophistiqués comme le CPS 1500, destiné au comptage automatisé des billets, ou encore le BDS qui sera affecté à la destruction des billets mutilés.
Je vous encourage donc à participer activement aux échanges et aux débats afin de nous permettre de trouver des solutions réalistes et durables aux différents problèmes qui nous préoccupent, dans l’espoir de dégager un consensus, un « modus operandi » pour un fonctionnement harmonieux du système.
Bonne journée, et bon travail à toutes et à tous !
Jean Baden Dubois
Gouverneur de la BRH