Discours du Gouverneur Jean Baden Dubois dans le cadre du lancement du forum sur la problématique de la disponibilité et de la distribution de la monnaie en Haiti
Madame le Directeur General,
Messieurs les représentants du Ministère de l’Économie et des Finances,
Monsieur le PDG du Groupe Croissance
Mesdames, Messieurs les Directeurs des Banques Commerciales,
Mesdames, Messieurs les représentants des supermarchés et autres établissements commerciaux,
Chers collègues de la BRH et du système bancaire,
Distingués invités,
Le thème du forum d’aujourd’hui est d’une importance qu’on ne saurait trop souligner. Cette importance tient au caractère vital que revêt la monnaie dans toute société qui participe aux mouvements et transactions de l’économie moderne. Il est vrai que, depuis quelques temps déjà, la monnaie traditionnelle est en proie à la concurrence vigoureuse de diverses formes non physiques de moyens d’échange. Il est vrai aussi que l’évolution monétaire la plus marquée dénote une tendance croissante à la dématérialisation, surtout avec l’émergence récente de monnaies électroniques comme le bitcoin. Toutefois, cette réalité n’empêche guère encore que la monnaie physique ou le cash reste cet élément nécessaire pour échanger pleinement dans nos sociétés contemporaines de production. En fait, on n’a pas hésité à attribuer au mouvement de circulation de la monnaie au sein de l’économie des attributs pareils au mouvement du sang à travers le corps humain.
Un rôle si prépondérant, essentiel même pourrait-on dire, s’explique par le fait que la monnaie est un intermédiaire de choix qui permet aux agents économiques de manifester une demande effective pour les divers produits disponibles sur le marché. Elle est donc cet instrument unique d’amélioration des circuits d’échanges, un maillon incontournable de la chaîne économique qui unit la production à la consommation. C’est une fonction que la monnaie a toujours exercée, et ce, comme nous le révèle la numismatique, à travers les diverses formes qu’elle a connues depuis le troc du tout début.
De manière encore plus fondamentale, et d’un point de vue conceptuel, la monnaie permet aux opérateurs du marché d’évaluer quantitativement ladite demande afin, d’une part, d’exprimer la force de celle-ci par rapport à l’offre disponible et, d’autre part, de refléter la rareté relative des biens et services telle qu’exprimée par le système des prix. À cela, il faut ajouter les atouts instrumentaux de la monnaie, lesquels se manifestent à travers les diverses fonctions de celle-ci. Ainsi, la monnaie :
- se fait unité de compte, de par sa divisibilité ;
- elle se fait réserve de valeur, de par sa durabilité ;
- et elle se fait moyen de paiement, de par le consensus collectif qui garantit son invariable acceptabilité.
Dès lors, au vu de tous les enjeux qui découlent du rôle qu’elle assume pour le financement de l’économie, l’on comprend que la monnaie se place au cœur de la mise en œuvre par la Banque Centrale de sa mission de surveillance du fonctionnement du système financier en vue d’en assurer la stabilité constante. C’est que le cash reste, jusqu’à aujourd’hui encore, le moyen prédominant de règlement des transactions financières routinières de l’économie domestique. Du coup, il revient à la Banque Centrale d’assurer que le système économique haïtien, dans toutes ses composantes, sans exclusive, dispose d’une monnaie fiable, et disponible sans restriction et de manière continue.
Ce mandat consistant à s’assurer que les moyens de paiement en monnaie fiduciaire mis à la disposition du public suffisent pour répondre aux besoins de l’économie, c’est à sa Direction de la Caisse et du Réseau que la BRH l’a confiée. Un tel mandat se place en ligne directe de la vision que le Conseil d’Administration que j’ai l’honneur de diriger a définie pour la BRH, et je cite :
« Une banque centrale moderne et efficiente, soucieuse de la stabilité des prix et du développement du système financier et déterminée à encourager la croissance des secteurs réels de l’économie dans l’optique d’une Haïti inclusive ». Fin de citation.
Cependant, la BRH croit qu’un système ne peut fonctionner à point que lorsqu’il y a cohérence entre les comportements de toutes les structures qui le composent. Si telle composante remplit le rôle dévolu à telle autre, des confusions se créeront, des goulots d’étranglement se formeront, et des inefficiences se développeront. Naturellement, ce système finira par s’essouffler.
L’organisation de ce Forum découle à la fois de cette vision d’inclusion des secteurs réels de l’économie et de ce mandat d’assurer l’approvisionnement adéquat du marché en monnaie fiduciaire.
Divers sujets seront débattus au cours de la journée. Citons, entre autres :
- la nécessité de créer un mécanisme de dialogue entre les Directeurs des Opérations des Banques afin de mieux servir les agents économiques ;
- la problématique de la disponibilité de la monnaie chez nous ;
- les annonces et propositions qui seront faites par la Direction de la Caisse et du Réseau pour une gestion plus moderne et plus efficiente des questions relatives à la gestion du cash ;
- et j’en passe.
Toutes ces conversations et tous ces échanges participent de cette politique d’ouverture que la BRH entend pratiquer à l’égard de tous les acteurs de l’économie réelle. La tenue de ce Forum est aussi une des nombreuses manifestations de notre politique de partage et de divulgation de l’information financière.
En vous accueillant ici ce matin à l’occasion du lancement de ce Forum, j’espère témoigner, s’il en était besoin, de l’importance que l’actuel Conseil d’Administration de la BRH accorde à la stabilité du système financier de notre pays. C’est également un gage de soutien envers la Direction de la Caisse et du Réseau qui a résolument embrassé la vision du Conseil et qui, ces derniers temps, se distingue par un certain nombre d’initiatives orientées vers cette modernité et cette efficience que nous prônons. Je pense particulièrement à l’acquisition et à la mise en service d’équipements sophistiqués comme le CPS 1500, destiné au comptage automatisé des billets, ou encore le BDS qui sera affecté à la destruction des billets mutilés.
Je vous encourage donc à participer activement aux échanges et aux débats afin de nous permettre de trouver des solutions réalistes et durables aux différents problèmes qui nous préoccupent, dans l’espoir de dégager un consensus, un « modus operandi » pour un fonctionnement harmonieux du système.
Bonne journée, et bon travail à toutes et à tous !
Jean Baden Dubois
Gouverneur de la BRH
Mesdames/Messieurs les PDG et Représentants des banques commerciales
Mesdames/Messieurs les Représentants du secteur privé
Monsieur le PDG du Group croissance
Monsieur le PDG de PROFIN
Chers collègues du CA de la BRH
Mesdames/Messieurs
Cette année encore, le menu est copieux mais équilibré. Un arbitrage difficile mais toujours à la portée d’organisateurs efficients qui ne sont pas à leur coup d’essai. Les activités sont de première qualité, ce qui garantit la satisfaction de cette auguste assemblée que vous formez et des esprits critiques que vous représentez. La richesse du Sommet International de la Finance est là ; dans ce creuset d’idées et de diversités. Bienvenue à la 7ième édition. Le thème central est de la plus haute importance : Financer l’Immobilier en Haïti. Il est au cœur d’une problématique plus large : le besoin d’une croissance forte et soutenue face à une dynamique démographique intense.
Mesdames et Messieurs,
Je voudrais me faire complice d’un acte de contagion ce soir. Celui de vous communiquer la joie et l’enthousiasme que je ressens à délivrer cette adresse à l’occasion de la 7ième édition du Sommet Internationale sur la Finance et de la deuxième édition du Fin Tech. Mais je ne parle pas qu’en mon nom.
- Je parle au nom du Group Croissance et de son Président-Directeur Général Kesner Pharel à qui j’adresse un hommage chaleureux pour la qualité d’organisation et la régularité d’un événement qui gagne en ampleur chaque année sur le plan de la participation et sur celui de la pertinence de thèmes d intérêt majeur pour les politiques publiques et les acteurs économiques.
- Je parle au nom des multiples stake holders dont la qualité et le niveau de représentation attestent de l’intérêt d’une communauté grandissante pour les questions de la Finance et pour le financement du développement en général.
- Je parle certainement au nom de la Banque de la République d’Haïti qui, depuis quelques années, est passée de l’autre côté des coulisses pour devenir une coorganisatrice active du Sommet. Notre équipe travaille d’arrache-pied à améliorer la valeur ajoutée que notre institution apporte à l’organisation de l’événement. Elle garantit ainsi l’objectif de familiariser davantage les acteurs économiques avec la vision, les objectifs, les instruments de la Banque Centrale ainsi que les contraintes auxquelles elle fait face.
Vous comprenez donc pourquoi le succès qui couvrira les assises qui se tiennent durant les cinq jours ouvrables de cette semaine de la Finance ne sera pas le fruit du hasard. Un nombre important d’acteurs y aura contribué. Aussi, permettez-moi d’associer la voix de l’auguste assemblée que vous représentez à celle du Conseil d’Administration de la BRH pour adresser des remerciements chaleureux à tous ceux qui, personnes physiques ou morales, à un niveau ou à un autre, auront fait de cette 7ième édition un succès de plus.
Mesdames et Messieurs,
La problématique du développement demeure le thème majeur dans un pays, où dans 65% des cas, le Produit Intérieur Brut par tête d’habitant est négatif sur les 36 dernières années. Pour le banquier central que je suis, le financement de la croissance, dans des conditions macroéconomiques saines, est au cœur de cette problématique. Il s’agit donc d’exclure les extrêmes que sont l’euphorie de la précipitation et la paralysie de l’attentisme. De ce point de vue, la consolidation des institutions financières, leur développement et l’élargissement de leur spectre d’action représentent la voie qui sied à une démarche raisonnée de politique monétaire propre à supporter la croissance.
La Stratégie Nationale d’Inclusion Financière participe de cette démarche et notre présence renforcée à ce Sommet répond au besoin d’en assurer la promotion à travers l’un des piliers importants de cette stratégie : l’éducation financière. C’est ainsi qu’au cours de la semaine dernière et pendant toute la semaine consacrée à la Finance, des cadres de la BRH se déplacent dans les écoles secondaires publiques et privées pour exposer aux écoliers des classes terminales des éléments basiques en économie et en Finance et traiter de sujets se rapportant à la mission et aux activités de la Banque de la République d’Haïti.
L’éducation financière est une entreprise de longue haleine qui devra toucher toutes les composantes de la population. Elle est pourtant appelée à porter des fruits assez rapidement et l’espérance de son rendement socioéconomique est parmi les plus élevées. Pour un Policy Maker, rien ne vaut une population éduquée des questions économiques et informées des politiques mises en œuvre. C’est la garantie première à l’émergence d’une double prévisibilité : celle de la réponse des agents économiques aux mesures envisagées et celle des solutions que doivent apporter les décideurs aux problèmes soulevés. Ce qui constitue la voie royale de la primauté des règles dans la conduite des politiques publiques sans omettre le rôle que jouent ces informations dans la formation des anticipations.
Une telle démarche devrait bénéficier tant qu’au cadre unique de l’environnement macroéconomique qu’aux cadres multiples des politiques sectorielles. Et dans le cas qui nous concerne aujourd’hui, à la réussite d’une politique éclairée de financement du secteur immobilier. Ce secteur se trouve à la jonction de trois dimensions d’un développement durable et intégré. Il est une sous-branche importante de la branche des Bâtiments et Travaux Publics autour de laquelle se construisent les infrastructures économiques et sociales. Il est un indicateur de mobilité sociale et de renforcement des classes moyennes. Il est une composante pérenne du moteur de la croissance économique à travers des effets directs notables et des effets induits renouvelés. Voilà pour l’essentiel, les motivations de la banque Centrale dans la promotion de ce secteur.
Mesdames et Messieurs
Le déficit de logements est un problème structurel que certains experts font remonter à la période de l’indépendance. Il participe d’une situation plus large liée aux problèmes de l’habitat et de l’urbanisation sans l’exclure de la problématique globale de l’aménagement du territoire. Cependant la nature du problème requiert une approche jointe qui tient de considérations de moyen et de long terme. Il s’en suit que les réponses aux problèmes du logement ne peuvent attendre la longue période de mise en branle d’une politique complète d’urbanisation. Elle doit, par contre, en tenir compte pour s’assurer de la durabilité des investissements dans le domaine et réduire les coûts futurs d’expropriation que la modernisation urbaine imposera aux ménages et au Trésor Public.
Les réflexions et les dispositions de la Banque Centrale en faveur du financement du secteur de l’immobilier remontent bien avant le 12 janvier 2010. La plus ancienne de ces dispositions date de la loi (décret) de création des Banques d’Epargne et de Logement qui les exonère de 50% des réserves obligatoires en vigueur. Ce qui atteste d’une forte tradition de préoccupation de l’institution pour le financement du secteur immobilier qui a cumulé, en 2009, un déficit d’offre de logements de 300,000 unités sur un stock de logements occupés de l’ordre de 2,1 millions unités selon des estimations venant de sources combinées.
Le séisme est venu fortement creuser le déficit d’offre déjà très sérieux. Les estimations cependant tombent dans un intervalle trop large pour être concordantes. Elles vont d’un minimum de 105,000 à un maximum de 300,000 unités détruites. Fort heureusement, une statistique qui fait autorité, puisque venant de l’Etat haïtien, estimait en 2013, que « la zone métropolitaine de Port-au-Prince à elle seule nécessitera au moins 500,000 unités de logement supplémentaires pendant les 10 prochaines années pour combler le déficit d’avant séisme, pour réparer les dégâts du tremblement de terre et pour répondre à la demande substantielle de logements consécutive au développement urbain. »
Aujourd’hui, on ne peut approcher la question du logement en Haïti qu’en termes de crise profonde. Mais tout profonde qu’elle est, cette crise contient les germes du renouveau. Il dépendra du leadership des autorités publiques et de la perspicacité des investisseurs privés pour en tirer partie. La nature du problème immobilier en fait un secteur à potentiel très élevé de croissance. Il ne s’agit pas que d’unités de logement à bâtir. Dans une perspective moderne : il s’agit d’un domaine dont le profil et le contenu restent à concevoir ; il s’agit d’un espace économique dont la portée sociale est essentielle si l’on veut reconstituer les classes moyennes ; Il s’agit d’un secteur qui se prête aisément à une dynamique large de création de richesse grâce à la multiplicité des chaines de valeurs qu’il induit et la durabilité du processus qu’il peut enclencher.
Conduire tous azimuts une politique de développement du secteur immobilier est donc une nécessité d’un point de vue social et un passage obligé d’un point de vue économique. Une entreprise conséquente qui visera à réparer un drame séculaire qui trouve ses manifestations dans un habitat rural épars et une expansion anarchique des espaces urbains. La Banque Centrale s’attèle à trouver les meilleurs moyens, en termes de montages et de mécanismes financiers, pour amplifier son apport à la mise en branle d’un projet qui reste un objectif majeur de croissance et de développement. Son rôle demeure ancré dans les dimensions (économiques) jointes de ce projet d’envergure :
- Une contribution incitative à la constitution par le secteur privé des affaires d’une offre diversifiée de logements et d’immeubles dans les meilleures conditions de coûts et d’environnement physique
- La promotion d’une dynamique de croissance susceptible de garantir la solvabilité d’une demande en progression régulière qui permette une rentabilité suffisamment élevée pour viabiliser le secteur
- L’effort de mobilisation des ressources pour financer les lourds investissements nécessaires à la réalisation d’économies d’échelle bénéfiques au marché. Je vous ferai grâce de calculs financiers rébarbatifs qui ne cadrent pas nécessairement avec mon adresse. Mais tentons pour le moins une arithmétique simple de la question immobilière. Restons dans la lignée d’une étude rendue publique après le séisme de 2010 pour nous en tenir à une demande annuelle de 4500 à 5000 unités venant de la classe moyenne. Dans des conditions raisonnables d’économie d’échelle, un prix unitaire moyen de $75,000 est dans l’ordre des transactions possibles pour des logements de niveau standard. Nous aboutissons pour cette seule composante de classe moyenne à un niveau annuel de l’ordre de 350 millions de dollars d’investissement résidentiel. Des ressources à la portée du système financier formel et dont le coût d’emprunt ne dépasserait pas les $700 le mois pour tendre vers les $350 au terme d’un prêt immobilier de 20 ans assorti d’intérêt bonifié de l’ordre de 5% à 6%.
Je n’irai pas plus loin en inférence pour projeter les effets directs et les effets d’entrainement d’un tel effort d’investissement sur l’économie. Contentons-nous d’admettre qu’ils sont potentiellement importants et durables s’ils sont renouvelés sur un horizon de moyen terme. Mais les étapes, diriez-vous, pour rendre faisables des objectifs de cette envergure, dans le cadre du développement du secteur immobilier, sont multiples et tiennent à de fortes pesanteurs de nature structurelle, légale et institutionnelle.
- Les contraintes majeures du problème cadastral qui limitent la mise en œuvre d’une politique de l’habitat, rationnent le financement immobilier tout en renchérissant les coûts.
- La multiplicité de coûts administratifs et fiscaux dont le cumul grève la part des ressources financières préposées à l’implantation immobilière proprement dite.
- L’inadéquation d’un cadre légal suranné qui occasionne de sérieux coûts d’immobilisation sur le portefeuille de crédit immobilier des institutions financières en raison de trop longs délais de réalisation de propriétés données en gage.
Ces problèmes, pour ne citer que ceux-là, font partie d’un environnement globalement défaillant qui décourage les investissements dans le secteur et dilue les impacts des mesures incitatives à son financement. D’où le rôle fondamental que les politiques publiques sont appelées à jouer pour desserrer les contraintes d’un domaine de production capable de porter la croissance et d’animer des pans divers de l’activité économique. L’arrêté d’application de la loi sur la copropriété est un pas dans la bonne direction. Il incite à la modernisation d’un secteur dont la réalisation du plein potentiel requiert deux voies d’actions :
- Celle portant sur les contraintes de nature structurelle et de nature juridico-administrative pour créer un cadre d’attraction et de rentabilité suffisantes des investissements.
- Celle visant à réduire sur le moyen terme la composante des importations dans les coûts de construction pour magnifier les effets indirects induits par la croissance du secteur.
Sur le plan de la mobilisation des ressources, la Banque Centrale poursuit les travaux nécessaires à la mise en phase de son action avec les exigences de développement du secteur immobilier. L’accent est mis particulièrement sur les contours de l’environnement financier propre à supporter l’effort de financement qui devra mobiliser l’ensemble des acteurs du système bancaire et au-delà. Nous sommes conscients des limitations d’une approche partielle où les préoccupations de coûts l’emportent sur la coordination de politiques publiques d’horizons divers. C’est pourquoi nos réflexions portent en priorité sur la mise en séquence des actions de politiques qui permettront de raccourcir les délais de réalisation des objectifs visés.
Entre temps, la politique de stimulation du crédit en faveur du relèvement du secteur de logement suit son cours. Comme vous le savez, La BRH a pris des mesures pour exonérer de réserves obligatoires les ressources collectées par les banques et utilisées à des fins de crédit au logement et au secteur hôtelier. De même des protocoles d’accord ont été signés avec certaines banques dans le cadre d’un programme visant à financer, en des termes favorables, l’acquisition, la rénovation ou la construction de logements au bénéfice de clients solvables. Les réponses du marché immobilier à ces dispositions prendront de l’ampleur au fur et à mesure que s’aplaniront les contraintes de nature structurelle et institutionnelle comme celui du cadastre.
Pour contourner ce dernier problème, la BRH s’est engagée dans des réflexions pour orienter un pan de sa politique du logement vers le financement de promoteurs ou développeurs de grands projets immobiliers au bénéfice des cadres de la fonction publique, des professionnels et de la diaspora haïtienne. Ces projets devraient viser la Construction de complexes d’appartements destinés à la location ou à la vente en copropriété, la construction de villages résidentiels, l’acquisition et la viabilisation de terrains destinés à un projet de logement.
Ce programme, une fois lancé, devrait servir de base au développement, dans le moyen terme, d’un marché obligataire à travers la titrisation des portefeuilles de prêts immobiliers. La mise en place d’un tel marché pourrait contribuer à une meilleure allocation de l’épargne des agents économiques, alimentant ainsi un cercle vertueux de développement de ce secteur d’avenir.
Mesdames, Messieurs
J’espère vous avoir communiqué un peu de mon enthousiasme sur la question immobilière. Au départ je faisais remarquer que la voie des solutions au problème du secteur n’est pas celle des extrêmes : ni précipitation… ni attentisme. La réponse au séisme du 12 janvier 2010 fut un bon exemple de ce comportement mesuré. La BRH a ressorti des mesures qui portaient sur le coût et l’accessibilité du crédit au logement. Une démarche qui, dans un premier temps, rentrait nécessairement dans le cadre d’une approche partielle. Pour le débiteur comme pour un créancier, ce sens de l’urgence ne pouvait trouver réponse que dans les instruments de politique monétaire pour apaiser les tensions du marché immobilier et inviter les agents économiques à plus d’optimisme.
Avec le bénéfice du recul, une approche plus complète s’est imposée à la réflexion sur la problématique de l’immobilier. Elle permet d’intégrer une meilleure compréhension des dimensions d’avant et d’après séisme dans les solutions qui se dessinent. Au cours des dernières années, les réflexions sont passées par un processus de maturation qu’on retrouve dans la qualité des propositions et le caractère d’application qui s’y dégage. Le 7ième Sommet de la Finance est l’espace idéal pour consigner ces propositions dans un cadre cohérent de réflexions pour l’action. Praticiens des questions la Finance, décideurs politiques, professionnels du secteur, universitaires et investisseurs y trouveront leur compte. Voilà tout le bien fondé de cet enthousiasme que je veux être contagieux.
C’est donc avec emphase que, au nom du Conseil d’Administration de la Banque de la République d’Haïti, je remercie tous ceux qui font de ce Sommet ce succès qu’il est déjà. Ces remerciements vont particulièrement à l’équipe du groupe Croissance et à son PDG Kesner Pharel ainsi qu’à l’équipe de la BRH qui a travaillé sous la supervision d’un membre du Conseil d’Administration en la personne de Ronald Gabriel. Qu’ils trouvent ici l’expression de notre reconnaissance.
Merci!
Mesdames, Messieurs,
Chers participants,
J’espère que ce colloque –avec cette brochette d’analystes distingués et experts de haut niveau comme Charles Castel, mon prédécesseur à la BRH, Fritz Duroseau mon actuel collègue au Conseil d’ Administration, et d’autres spécialistes universitaires et de la communauté internationale- donnera lieu à des échanges fructueux susceptibles de conduire à des politiques publiques favorables à la stabilité et à la croissance économiques.
Mesdames, Messieurs,
Il est difficile d’exagérer –au moins pour Haïti- l’importance des remises de fonds, communément dénommées Transferts de fonds sans contrepartie en provenance de l’étranger ou encore Transferts courants dans la nomenclature internationale de la balance des paiements. Cet agrégat, qui regroupe les dons officiels officiels reçus de l’étranger et les envois de travailleurs d’origine haïtienne, s’élevait à US $2,5 (26.1% du PIB) milliards en 2014, dont 563.0 millions de dons officiels et US $2.0 milliards (19.7% du PIB) en remises de travailleurs. Les transferts courants (sur une base nette) devraient atteindre US $2.7 milliards par an (29.2% du PIB) et les envois de travailleurs autour d’US $2.3 milliards (25.0% du PIB) de cette année à l’exercice 2020-2021. A 22.7% du PIB en 2014, Haïti figure en 8ème place dans la liste des plus gros receveurs de transferts (ou les pays les plus dépendants des envois de travailleurs) après le Tadjikistan, la République Kyrgyz, le Népal, Tonga, la Moldavie, le Libéria et les Bermudes, selon la Banque Mondiale.
Mesdames, Messieurs,
Les transferts courants ne sont pas « produits » par l’économie comme le sont les exportations de biens et services et ne dépendent pas de l’économie comme le sont les importations de biens et services. Les recettes d’exportations nettes proviennent d’activités réelles servant de contrepartie alors que les transferts de fonds courants C’est un agrégat relativement autonome par rapport au reste du pays. En fait, il y aurait une relation négative entre l’état de l’économie et les transferts courants dans la mesure où l’aide humanitaire ainsi que les envois de travailleurs augmentent sensiblement après les catastrophes naturelles, ceteris paribus. En attendant plus d’études sur le sujet, les transferts de fonds semblent dépendre beaucoup plus du revenu des pays expéditeurs que de l’action des pays receveurs.
Ainsi la stagnation économique, la dégradation de l’ environnement physique et l’ explosion démographique, en favorisant l’ émigration massive –souvent illégale- de ressortissants haïtiens vers l’ Amérique du Nord et les Caraïbes (et maintenant vers l’Amérique du Sud) coïncident avec une expansion extraordinaire des transferts courants de US $64.8 millions en 1981 à US $234.3 millions en 1991 pour atteindre US $768.6 millions en 2001 et US $2.8 milliards en 2011.
Un premier constat est que les transferts courants, tout en finançant le reste de l’économie, augmentent plus vite que le PIB et, par conséquent, ne contribuent pas beaucoup à la croissance. Un deuxième constat qui dérive du premier : à part la construction de résidences et l’acquisition d’instrument aratoires et d’autres outils de production, les transferts de fonds, particulièrement les envois de travailleurs, financent de plus en plus plus les importations de produits alimentaires ou d’habillement, au détriment de la production locale.
Un troisième constat est le dynamisme observé des transferts vers l’extérieur (par opposition aux transferts de l’extérieur) notamment depuis le tremblement de terre de janvier 2010. Renforçant une tendance qui remonte à la fin des années 1980, avec les turbulences universitaires et la dégradation relative de la qualité de l’enseignement, des transferts vers l’extérieur financent en permanence la scolarité des membres de familles émigrés, souvent depuis le niveau secondaire.
Mesdames, Messieurs, La BRH a la charge de la préparation de la balance des paiements et, par conséquent, compile les données sur les transferts courants de fonds, notamment les envois des travailleurs, aussi bien vers que de l’extérieur. Elle travaille conjointement avec ses partenaires notamment l’ IHSI, le Centre d’Etudes Monétaires Latino-Américains (CEMLA), la BID et le FMI pour l’amélioration constante de la qualité des données statistiques. La BRH également surveille de près les flux de transferts à des fins d’évaluation systématique des liquidités sur le marché des changes et le marché monétaire, dans le cadre de l’exécution de la politique monétaire.
Les transferts sous forme d’envois de travailleurs sont devenus la plus grande source de financement extérieur dans les Caraïbes et en Afrique, dépassant de loin l’aide officielle au développement, les investissements directs et les investissements de portefeuille. Le récent rapport de la Banque Mondiale prévoit que les envois de travailleurs dépasseront US $500.0 milliards l’an au cours des prochaines années.
Mais, outre l’ampleur de ces flux, il a été observé que les transferts de fonds « possèdent une valeur intrinsèque en matière de développement » et jouent un rôle de « vecteur pour faciliter la plus grande inclusion financière », selon l’Organisation Internationale de la Francophonie. Les revenus de transferts supportent la consommation journalière en nourriture et en énergie ainsi que les investissements de base dans l’éducation, par exemple. Ces ressources permettent également de financer le lancement de bon nombre de petites et moyennes entreprises et représentent également « un important outil d’amélioration de l’autonomisation économique des femmes… ».
Dans ce contexte, la BRH met tout en œuvre pour la réalisation de l’objectif mondial de réduction des coûts des transferts de 11 à 5%, l’accès aux services de transferts pour les plus pauvres et l’ utilisation des transferts pour faciliter une plus grande inclusion financière et une croissance économique de qualité.
Sur ce, Mesdames et Messieurs, je souhaite le plus grand succès à la conférence.
Merci.
La Banque de la République d’Haïti a achevé la construction de son centre de convention et de documentation d’une superficie de plus de 6000 mètres au bas de la ville dans le centre historique de Port-au-Prince
Cette nouvelle construction, à l’ architecture contemporaine et audacieuse, occupe l’angle des rues Pavée et du Quai. Sa structure de béton repose sur plus de 360 pieux en acier et sa conception est le fruit d’un travail acharné d’une équipe d’architectes et d’ingénieurs aguerrie qui a coordonné chacune des étapes menant a la concrétisation de cette longue aventure, depuis sa conception jusqu’à la supervision des travaux.
Ce bâtiment marque un jalon important dans le nouveau développement du centre-ville de Port-au-Prince, puisqu’il est parmi les premiers édifices publics a y être reconstruits en intégrant des technologies de pointe en matière de construction parasysmique et paracyclonique.
Plus de 1000 mètres carres de toitures végétalisées qui réduiront d’autant les ilôts de chaleur au centre-ville
- Un lobby principal d’entrée isolé des rues adjacentes par un mur végétal
- Une ventilation et un éclairage naturels maximisees dans tous les espaces occupés
- Des panneaux solaires pour le chauffage de l’eau domestique
- Un système de récupération des eaux de pluie et des eaux grises des lavabos pour l’irrigation automatique des aménagements paysagers
- Des systèmes de traitement de l’air à vitesse variable controlée par détecteurs de mouvement, ainsi que des unités de ventilation qui auront la possibilité de fonctionner en mode de refroidissement gratuit lorsque la température extérieur sera favorable
- Des appareils de plomberie à débit réduit en eau incluant des cabinets à double chasse
- Des appareils d’éclairage de type LED et des moteurs à haute efficacité énergétique
- Des brise-soleil en bois d’ IPÉ réduisant les accumulations de chaleur thermique
Une salle d’ exposition multifonctionnelle d’une superficie totale de 900 m2 avec un dégagement de 10 mètres libres sous son plafond et pouvant recevoir près de 1000 visiteurs
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- Plusieurs configurations de cette grande salle permettent la tenue d’évènements diversifiés; notamment des expositions de grand calibre, des conférences, des spectacles musicaux et théatraux ainsi que des conventions
- Cette salle, dotée d’équipements techniques multimédia à la fine pointe, est équipée de deux cloisons mobiles et motorisées permettant sa subdivision en 3 salles distinctes, deux d’entre elles bénéficiant d’ un système de climatisation, et pouvant être généreusement ouvertes sur l’ extérieur
- 2 salles de régie munies des équipements permettant la traduction simultanée
- 4 salles de réunion, équipées de système de visioconférence, chacune d’une superficie de 65 m2 pouvant acceuillir chacune jusqu’à 70 personnes
- Un foyer d’une superficie de 300m2, constituée d’une terrasse extérieure couverte et immédiatement accessible depuis le lobby d’entrée, menant à la salle principale et pouvant acceuillir 300 personnes
- Un lobby d’entrée, généreusement ouvert sur la rue, planté de grands palmiers et d’une superficie de 380 m2
- Un restaurant pouvant recevoir 125 personnes
- 5 locaux à bureaux sur la rue Pavée de superficies variant de 35 m2 à 55m2
- Un espace de documentation et de bureaux d’une superficie de 290m2
- Un secteur administratif de près de 120m2
- Un loge d’artiste pour les prestations musicales et théatrales
Enfin, des matériaux nobles et naturels, intégrant la pierre du pays et le bois d’ IPÉ
Je dois commencer par féliciter le président et les membres de la Chambre de Commerce et d’Industrie de la Grand’Anse pour cette initiative d’organiser, en partenariat avec la Banque de la République d’Haïti (BRH), cette conférence sur la transformation économique de ce département géographique.
Je présente mes vifs remerciements aux organisateurs pour ce grand honneur fait à la BRH en l’associant à cette activité qui coïncide avec la fête patronale de Jérémie, la magnifique cité des poètes. Je profite donc de cette occasion pour souhaiter, au nom de mes collègues du Conseil d’Administration de la BRH et en mon nom propre, une bonne fête à tous les Jérémiennes et Jérémiens.
C’est donc pour moi un immense plaisir de prendre la parole dans le cadre de cet événement prestigieux, qui, sans nul doute, contribuera à mettre en valeur les nombreux potentiels économiques du département de la Grand’Anse. Le département doit se relever des conséquences néfastes de l’ouragan Matthew, par la création d’un climat favorable à l’investissement privé.
Depuis le séisme du 12 janvier 2010, la BRH tente de jouer sa partition dans la relance de l’économie nationale à travers des mécanismes de stimulation du crédit productif, c’est-à-dire, à forte valeur ajoutée et avec des effets induits sur la croissance économique, les exportations et la création d’emplois durables. Sous mon administration, à l’intérieur d’un cadre de politiques publiques qualifié de « pro-croissance », ces mécanismes initiés dans le secteur immobilier ont été renforcés et étendus à d’autres secteurs économiques, notamment l’Agriculture et l’Agro-industrie. C’est donc dans ce contexte particulier que je vais vous entretenir des objectifs visés par ces mécanismes.
La BRH, de par sa loi organique, entend utiliser les moyens dont elle dispose pour conduire la politique monétaire d’Haïti et veiller à la stabilité du système financier national. En exécutant ce mandat, elle s’assure que ses actions sont inscrites dans le cadre de relance défini par les autorités gouvernementales.
Je me réjouis toujours de participer à ces rencontres qui offrent l’occasion d’échanger des idées, de débattre et de partager des réflexions en vue non seulement d’aider à la stabilité macroéconomique, mais aussi de contribuer à une croissance robuste et durable. A l’instar de celle des autres régions du pays, la population Grand’Anselaise estimée, en 2015, à environ 468 000 habitants, est jeune et en quête d’opportunités. Les politiques publiques n’ont jusqu’à présent pas produit le niveau de bien-être collectif auquel elle aspire et auquel elle a droit. Nous voulons, à travers ces mécanismes incitatifs, articulés avec d’autres programmes publics, lui donner la chance de travailler, d’entreprendre, afin de réduire sa dépendance par rapport aux transferts privés de nos sœurs et frères de la diaspora. Nous voyons aussi en notre participation, une occasion d’apprécier, au niveau de la Grand’Anse, la carence d’information qui prévaut à travers le système financier national et qui affecte l’allocation efficiente de l’épargne aux investissements viables. La BRH entend tout mettre en œuvre en vue de rendre disponible les informations relatives à ses politiques, aux mesures adoptées et aux projets sur lesquels elle travaille. Dans cette optique, une nouvelle Direction de Communication y a été créée afin d’améliorer le circuit d’information avec le Grand Public à l’échelle nationale. En conséquence, je vous donne la garantie que la Grand’Anse ne sera pas laissée pour compte dans ce processus.
Sans vouloir réveiller des souvenirs douloureux qui nous ont fait tous souffrir après le passage de l’ouragan Matthew, je dois quand même dire que ces évènements ont été pour moi l’occasion d’apprécier le courage et le sens de solidarité de la population Grand’Anselaise. Permettez-moi de saluer la résilience de cette population qui, en dépit des catastrophes et des situations dramatiques, a toujours su se relever pour construire et se reconstruire. Comme un Phénix, cette population sait comment renaître de ses cendres. Les peuples qui savent construire ne peuvent pas disparaître. C’est cette pensée qui motive les gens à investir et à faire un pari sur l’avenir. Rien de splendide n’a jamais été réalisé, sauf par ceux qui ont osé croire que quelque chose à l’intérieur d’eux-mêmes était supérieur aux circonstances. – Bruce Barton. Aussi, tirons les leçons qui s’imposent et repartons sur de nouvelles bases en faisant mieux cette fois-ci, de manière structurante et pérenne.
Mes chers amis
Nous sommes dans une région qui, à travers l’histoire, a toujours été? considérée comme l’un des principaux greniers du pays, notamment pour la qualité? de ses fruits (café?, cacao et arbre véritable), pour la diversité? de ses tubercules et pour l’abondance de ses côtes en fruits de mer. A cela, il faut ajouter les nombreux potentiels touristiques et éco-touristiques qui jusqu’à date sont quasi-inexploités.
Je salue l’action de la Chambre de Commerce et d’Industrie de la Grand’Anse (CCIGA), qui, a? travers son concept de plan régional intégré? 2012-2014, comptait essentiellement sur les facteurs suivants : un éveil des hommes, une mise en commun des ressources, un alignement des capacités et organismes d’exécution dans le département pour atteindre et alimenter les marchés locaux et régionaux. Beaucoup d’idées contenues dans ce plan sont encore d’actualité et peuvent servir comme base de réflexion dans la mise en place d’un plan de relance de l’investissement dans la région.
Si l’on se base sur les capacités naturelles et autres potentialités de la région, il est à mon humble avis possible d’enclencher une dynamique de croissance nécessaire à l’amélioration du niveau de vie. Il suffit de le vouloir et d’y croire.
Les importations de produits alimentaires connaissent une hausse continue. En 1986-1987, elles représentaient 19,2% des importations totales. Ce ratio est passé à 27,7% en 2014-2015. En parallèle, le poids de l’agriculture ne cesse de baisser dans notre produit intérieur brut et, pour les mauvaises raisons. Il est passé d’environ 42% du PIB en 1970 à environ 20% aujourd’hui. Je dis, pour les mauvaises raisons, car ce déclin du poids de l’agriculture n’est nullement attribuable à une augmentation de celui des industries de transformation, mais à une dépendance accrue par rapport à l’extérieur. Il nous faut impérativement trouver la meilleure formule pour augmenter l’offre de produits et de services, sinon il sera de plus en plus difficile de contenir, à terme, les pressions inflationnistes et les fluctuations indésirables du taux de change. Notons que cette dépendance par rapport à l’extérieur nous a rendus de plus en plus vulnérables aux chocs externes, notamment les chocs de prix – par exemple, les troubles sociopolitiques ou « émeutes de la faim », d’avril 2008, causés par la hausse des prix internationaux de céréales en particulier du riz, dont le cours mondial est passé d’environ 500 à plus de 1250 dollars la tonne métrique durant la période concernée.
Les problèmes de change et d’inflation ne peuvent et ne pourront être résolus de manière définitive par la politique monétaire quand ils sont causés par des facteurs structurels tels que le déficit chronique de la balance des paiements et la diminution continue de la production. Donc, nous devons générer de manière permanente des quantités de devises supérieures ou égales à nos consommations en devises. E la pa gen wout pa bwa, fòk nou rekomase pwodui e rekomanse ekspòte.
Point n’est besoin de rappeler le rôle que doit jouer le secteur privé dans la création de la richesse nationale. L’augmentation de la croissance économique, la réduction de la pauvreté et l’amélioration des conditions de vie de la population exigent un secteur privé dynamique constitué d’investisseurs locaux et de la diaspora et d’investisseurs directs étrangers. Pour être efficace il est indispensable que l’investissement public remplisse adéquatement son rôle de catalyseur de l’investissement privé. Le pays se retrouve en situation d’épargne nationale négative avec une composante d’investissement du budget de la République tributaire des appuis internationaux. La création d’un climat favorable aux investissements directs étrangers est donc un passage obligé. Ces derniers qui traduisent en général un intérêt durable de la part du promoteur du projet envers le pays ciblé ont plusieurs vertus. Ils apportent les capitaux, le savoir-faire, de nouvelles demandes, la connexion aux réseaux internationaux. Les grandes chaines d’hôtels internationales font partie de grands réseaux touristiques qui comprennent agences de voyages, lignes aériennes, hôtels, restaurants, compagnies de location d’automobiles, écoles professionnelles, services de loisirs, chaînes d’approvisionnement agricole, etc. et qui viennent avec leur demande. Les Bahamas viennent d’accueillir un investissement direct étranger de 2 milliards de dollars dans le secteur hôtelier, le projet Bahama Mar. La Corée du Sud, fort de sa stratégie axée sur les investissements directs étrangers est passée, du début des années 60 à aujourd’hui, d’une balance commerciale caractérisée par des exportations de produits primaires d’environ 600 millions de dollars à des exportations de produits industriels estimés à plus de 600 milliards de dollars par année. Son PIB per capita est passé de 143 dollars en 1963 à près de 26 mille dollars en 2016 contre moins de 800 dollars pour Haïti et 6.910 dollars pour la République Dominicaine. Nos flux nets d’Investissement Direct Etranger n’ont jamais excédé historiquement 200 millions de dollars par an alors que pour la République Dominicaine et la Corée du Sud, ils ont atteint respectivement 2,5 et 10,8 milliards de dollars en 2016.
Mesdames /Messieurs
En tant qu’entrepreneurs, producteurs, chefs d’entreprises, vous connaissez très bien l’importance du crédit dans le développement de l’activité économique et le lien qui existe entre le crédit, l’investissement, la production et l’emploi. Toutefois, vous conviendrez avec moi que l’augmentation du crédit au secteur privé ne provoque pas automatiquement la croissance économique et la baisse du chômage. Rappelons qu’en 2014-2015 le crédit accordé par le système bancaire a augmenté de près de 20% après avoir crû en moyenne de 30% durant les exercices 2010-2011 à 2012-2013, alors que le taux de croissance économique n’a été que de 1,4% pour une croissance démographique de 1,8 %. Cette croissance du crédit a dans une large mesure favorisé des importations de biens de consommation au détriment de la production locale. Le niveau de pauvreté a donc légèrement augmenté durant cette période.
C’est dans ce contexte particulier que nous accueillons tout effort des autorités visant l’amélioration de la qualité des investissements publics, une meilleure cohérence des politiques publiques et la minimisation des freins structurels à la production, à l’investissement et aux exportations. Le système financier haïtien est très liquide. Il n’attend que cela pour orienter ses ressources oisives vers des projets porteurs capables de changer, de manière pérenne, la destinée de nos frères et sœurs haïtiens.
C’est donc dans cette perspective que la BRH a mis en œuvre des programmes spécifiques en vue de promouvoir certains secteurs productifs clés à forte valeur ajoutée et à fort potentiel, susceptibles d’avoir des retombées directes sur l’emploi et la croissance économique. Ces programmes d’incitation, qui vous seront présentés un peu plus tard, permettent un accès élargi au crédit en monnaie locale et à des conditions abordables. Ils visent notamment :
1. L’augmentation de l’offre de logements et la baisse des loyers ainsi que la réduction des coûts de construction et une amélioration de l’urbanisation ;
2. La stimulation du secteur de l’assemblage et des exportations et emplois y associés ainsi que l’augmentation du nombre d’espaces industriels disponibles dans le pays ;
3. La stimulation des exportations en général, de la production locale et des rentrées nettes de devises de l’économie ;
4. Le développement du secteur touristique, principalement à travers sa composante hôtelière ;
Lesdits secteurs peuvent ainsi obtenir du crédit à des taux d’intérêt plus favorables.
D’autres projets sont à l’étude dans le cadre des mesures d’incitation aux secteurs productifs. Il s’agit, notamment, de la promotion de projets de développement immobilier ; de la promotion de la copropriété et de zones franches agricoles ; et de la mise en place, au bénéfice du secteur agricole, de garanties partielles de crédit. La BRH encourage tous les acteurs impliqués dans le développement de l’agriculture à mettre sur pied de mécanismes d’assurance, notamment pour les récoltes. Ces derniers doivent jouer un rôle clé dans la mitigation des nombreux risques auxquels est exposé le secteur et qui rendent le coût des crédits trop souvent dissuasif aux yeux des débiteurs.
Enfin, la BRH s’est récemment engagée dans une série d’activités de facilitation de dialogue et de réflexion entre les acteurs clés de différentes filières d’activité à forte valeur ajoutée à travers des tables sectorielles de concertation. La dernière en date, organisée par le Ministère de l’Agriculture, a porté sur la filière cacao. Cet exercice est basé sur l’identification des freins caractérisant les différents maillons de la chaine de valeur et qui en entament l’évolution. Il porte aussi sur l’élaboration de recommandations à l’autorité compétente pour la minimisation des freins identifiés. Il vise donc, le renforcement des politiques et des mécanismes qui favoriseront l’augmentation des financements au bénéfice de projets de plus en plus viables et capables d’influencer le développement économique du pays de manière durable.
La BRH est venue vers vous pour partager ces informations utiles. Elle est convaincue qu’elles seront utilisées à bon escient. C’est en posant ces jalons que nous réussirons à créer dans le département de la Grand’Anse, ce cercle vertueux qui devrait induire :
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l’amélioration de la production et des exportations de biens et de services, notamment les services touristiques ;
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des créations d’emplois soutenus et durables ;
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une augmentation de la productivité de la main-d’œuvre et du capital ;
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un élargissement de l’assiette fiscale ;
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une augmentation soutenue du PIB per capita ;
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un élargissement de la classe moyenne ;
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la projection d’une nouvelle image internationale du département et du pays aux yeux des investisseurs et consommateurs potentiels.
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Je vous remercie de votre attention et encore une fois, bonne fête de la Saint-Louis.